L’Imam as-Sajjãd (Psl) et les membres de la famille prophétique, après la
tragédie de Karbalã, furent transportés à Sham (Damas). C’est là qu’il dénonça
de façon complète, avec Hazrat Zeinab (P), la corruption du régime des Omeyyades
et montra la juste voie de l’Imam al-Hussein (Psl) assassiné à Karbalã et la
voie du salut.
Sur tout le parcours qui les conduisait de Karbalã à Sham, l’Imam as-Sajjãd (Psl)
expliquait les raisons du soulèvement de l’Imam al-Hussein (Psl). Les discours
de Hazrat Zeinab (P) et de Fatima as-Soghra, sous la direction de l’Imam as-Sajjãd
(Psl), eurent aussi une grande influence.
L’Imam as-Sajjãd (Psl) profitait de chaque occasion pour faire revivre ces
évènements tragiques et rappelait le souvenir de son père quand il buvait de
l’eau, il pleurait quand il voyait les enfants d’Abal Fazl (Psl). Quand on
voulait tuer un mouton, il demandait si on lui avait donné à boire et ajoutait
que son père avait été tué sans qu’on eût étanché sa soif. Ces rappels de ce qui
s’était passé le jour d’Ashourã, étaient une manière de garder vivant dans les
mémoires, le souvenir de ce soulèvement divin.
Le premier jour du mois de Safãr de l’année 61 de l’Hégire, les membres de la
famille prophétique (P) sont arrivés dans la ville de Cham qui subissait depuis
quarante ans, une vaste propagande contre l’Imam Ali (Psl). Moãwiya avait acheté
certains prédicateurs qui insultaient et dénigraient l’Imam Ali (Psl) du haut de
leur chaire.
Les habitants de Cham qui n’avaient pas vu le Prophète (Psl) connaissaient
l’islam par le biais de Moãwiya. Ils considéraient les Omeyyades comme les
descendants du Prophète (Psl) et s’imaginaient qu’un «étranger» à la
religion s’était soulevé contre Yazid qu’ils appelaient l’émir des croyants, et
avait été tué par l’armée du calife et sa famille faite prisonnière. Pour fêter
l’entrée de la caravane dans la ville, ils avaient décoré les rues et se
préparaient à une grande fête.
Le discours de l’Imam as-Sajjãd (Psl) a profondément changé la façon de voir des
gens de Koufa et leurs idées sur les Omeyyades. Au début de la réunion, Yazid
ordonna à un de ses orateurs d’insulter Ali (Psl) et ses enfants, et d’expliquer
le bien fondé de l’évènement de Karbalã. L’orateur se rendit sur la chaire et
fit la louange de Dieu, puis dit le plus grand mal de l’Imam Ali (Psl) et de
l’Imam al-Hussein (Psl).
Il poursuivit son discours avec une longue louange de Moãwiya et de Yazid.
L’Imam as-Sajjãd (Psl) s’adressa
alors à lui en disant: « Malheur à toi ! Tu as choisi
la colère de Dieu et la satisfaction des gens. Regarde la place qui t’est
réservée en enfer et prépare-toi à y entrer. Se tournant vers Yazid
il dit: « Est-ce que tu me permets de dire un mot?
»
Yazid qui avait peur que les révélations de l’Imam (Psl) aient une influence sur
les gens, ne donna pas l’autorisation à l’Imam de parler. Moãwiya, fils de
Yazid, dit à son père: « Laisse-le dire ce qu’il veut quelle importance peuvent
avoir ses paroles?»
Yazid répondit: « Tu ne connais pas le pouvoir de cette famille, ils ont hérité
de père en fils d’une éloquence exceptionnelle et j’ai peur que son discours
soit à l’origine d’un soulèvement dans la ville qui sera à nos dépends ».
Des gens insistèrent auprès de Yazid pour que l’Imam as-Sajjãd (Psl) puisse
prendre la parole.
Yazid leur dit que l’Imam (Psl) ne descendra pas de la chaire sans l’avoir
dénoncé et dénoncé les membres de la famille d’Abou Sofian. Quelqu’un dit à
Yazid: « Que peut faire un homme si jeune? »
Yazid répondit qu’il faisait partie d’une famille dont les enfants sont
instruits dès le plus jeune âge.
Cependant Yazid fut obligé de céder face aux insistances des habitants de Cham,
et autorisa l’Imam (Psl) à monter en chaire.
Le discours de l’Imam as-Sajjãd (Psl) fut si virulent que toute la foule était en pleurs et les cœurs en effroi.
L’Imam (Psl) après avoir fait la louange de Dieu, déclara:
« Vous qui êtes présents ici, sachez que Dieu m’a donné six particularités et
sept supériorités sur les autres, la science, la patience, la générosité,
l’éloquence, le courage et la sympathie des croyants. Il nous a conféré une
supériorité sur les autres par la présence dans notre famille, du grand Prophète
de l’islam (Psl), du «véridique» (l’Imam ‘Ali (Psl)), de Ja’afar Tayãr, du lion
de Dieu et du Prophète (Psl) (Hamza), et de l’Imam Hassan et de l’Imam
al-Hussein (Psl), les deux petits-fils du Prophète (P). Ceux qui m’ont reconnu,
m’ont reconnu, et pour ceux qui ne m’ont pas reconnu, je présenterai mes pères
et ma famille.
Je suis le fils de la Mecque et de Ména, Je suis le fils de Zamzam et de Safã,
je suis le descendant de celui qui a porté la Pierre noire dans son manteau et
l’a mise à sa place, je suis le descendant de celui qui fit les meilleurs
Tawaafs (circombulations autour de la Kaaba) et les meilleures parcours
entre Safã et Marwa, je suis le descendant de celui qui fit le meilleur
pèlerinage, qui fit les meilleures invocations, qui monta sur Baraq, je suis le
descendant d’un Prophète qui en une nuit, se rendit de la mosquée Al Haram
à la mosquée Al-Aqsã, je suis le descendant de celui que Gabriel conduisit au «
Cèdre du septième ciel » et se rapprocha de Dieu au
point le plus proche, je suis le descendant de celui qui priait avec les anges,
je suis le descendant du Prophète qui fut l’interlocuteur de la Révélation
divine, je suis le fils de Mohamad Mostafã et d’Ali Mortadhã (Psl), je suis le
descendant de celui qui écrasa le museau des arrogants jusqu’à ce qu’ils
reconnaissent le monothéisme.
Je suis le fils de celui qui combattait autant que le Prophète avec deux épées et deux lances, a émigré deux fois et a fait deux fois serment d’allégeance, a combattu les mécréants dans les batailles de Honain et de Badr, et n’a jamais même un seul instant, mécru en Dieu. Je suis le descendant du plus juste parmi les croyants, de l’héritier des Prophètes, de celui qui vint à bout des polythéistes, de l’émir des musulmans, de la lumière des combattants, de la parure des pieux, de la fierté de ceux qui pleurent, je suis le descendant du plus patient des patients, et de celui qui priait le plus parmi les membres de la famille prophétique. Je suis le descendant de celui que Gabriel a confirmé et que Michael a aidé, je suis le descendant de celui qui a défendu les musulmans, qui a combattu ceux qui avaient brisé leur serment, rejeté la justice et oublié la religion, et combattu ses ennemis.
Je suis le descendant du meilleur membre de la tribu de Koraïch, je suis le descendant de celui qui a répondu le premier à l’invitation de Dieu et du Prophète (Psl), je suis le descendant de celui qui a cru avant tous, brisé l’échine des assaillants et anéanti les polythéistes. Je suis le descendant de celui qui était « la flèche de Dieu » pour les hypocrites, la langue de la sagesse pour les croyants, le défenseur de la religion de Dieu et son représentant, le jardin de la sagesse divine et le porteur de la science divine, celui qui était courageux, généreux, beau, possédait toutes les qualités, était satisfait de la volonté divine, affrontait les difficultés, était patient, constamment en jeûne, pur de toute souillure et priait énormément.
C’est lui qui vainquit les
ennemis et le clan des mécréants. Il avait un cœur fort et une grande volonté,
et comme un lion courageux, brisait les flèches qui pleuvaient sur le champ de
bataille et les dispersait comme disperse le vent. Il était le lion de Hedjaz et
le grand homme d’Irak, l’homme de Médine, de la Mecque, de Heif, d’Oqba, d’Ohod,
de Shadr, de Mahajer et de Badr, le père de Hassan et al-Hussein. Oui, c’était
mon père, ‘Ali ibn Abi Tãlib (Psl) », puis il ajouta « Je suis le fils de
Fatima Zahra (Psl) la plus grande femme de toutes les femmes du monde »
L’Imam as-Sajjãd (Psl) continua cette litanie et les gens se mirent à crier et à
pleurer. Yazid craignant une émeute, ordonna qu’on fasse l’appel à la prière et
interrompit le discours de l’Imam (Psl).
Quand le muezzin annonça : Dieu est le plus grand, Dieu est le plus grand , l’Imam as-Sajjãd (Psl)
dit: « Il n’y a rien de plus grand que Dieu
»
Quand le muezzin annonça : J'atteste qu'il n'y a nulle divinité digne d'être adorée sauf Allah, le fils de
l’Imam al-Hussein (Psl) dit: « Mes poils, ma peau et ma
chair attestent que Dieu est unique »
Quand le muezzin annonça : J'atteste que Mohammed est le Messager de Dieu, l’Imam as-Sajjãd
(Psl) retira le turban qu’il avait sur la tête et lui ordonna de se taire et de
le laisser parler.
Puis du haut de la chaire, il s’adressa à Yazid en ces termes:
«Yazid, ce Prophète (dont il est question dans l’appel à la prière) est-il mon grand père ou ton grand père? Si tu dis que c’est ton grand père, tout le monde sait que tu mens si c’est mon grand père, pourquoi donc as-tu tué mon père, pris ses biens et trainé sa famille en captivité?
L’Imam (Psl) alors se mit à pleurer, se déchira le col en signe de douleur et jura que dans le monde il n’y avait personne d’autre dont le grand père fut le Prophète en dehors de lui et s’écria: « Pourquoi cet homme a-t-il tué mon père et nous a faits prisonniers comme des soldats romains? Yazid! Tu t’es rendu coupable de ce crime et tu prétends croire en Mohamad et fais face à la Qibla! Malheur à toi, Mon aïeul et mon père seront tes ennemis le jours du jugement ».
Yazid cria au muezzin de faire le second appel à la prière, un brouhaha se fit
entendre dans la foule, certains firent la prière et d’autres partirent sans la
faire. Le discours de l’Imam as-Sajjãd (Psl) avait profondément ému et réveillé
les gens et leur avait redonné courage.