La bataille de Siffine et les Khawarej (les dissidents)
Prière faite avant la Bataille
Il dit: «O Allah, créateur du plafond surélevé, de l’espace étagé, lieu de succession de la nuit et du jour, parcours du soleil et de la lune, itinéraire des étoiles mouvantes, dont tu as fait une demeure pour une partie de tes anges qui ne se lassent jamais de t’adorer !
Allah, Créateur de cette terre dont tu as fait un lieu de repos pour les hommes et un royaume pour les animaux et autres créatures de toutes sortes dont on ne connaît pas le nombre;
Créateur des montagnes hautement dressées, piliers dont tu as doté la terre et refuges pour les hommes;
Si tu nous fais vaincre notre ennemi, empêche-nous d’être injustes et tyrans, et dirige-nous vers l’équité, si tu les fais vaincre, accorde-nous le martyre et évite nous la discorde.»
Il s’adresse à ses compagnons
Les Syriens étaient partisans de Muawiya, adversaire d’Ali
Je déteste de vous voir les injurier. Il serait d’un argument plus valable pour vous de parler de leurs actes et de leur situation.
Et au lieu de les insulter, vous feriez mieux de dire: «O mon Allah préserve notre sang et le leur, rapproche notre cœur du leur, fais-leur prendre le bon chemin jusqu’à ce que l’équité soit connue par l’ignorant et que celui qui a fait sienne l’iniquité s’en éloigne.»
Au sujet des deux arbitres
Vos chefs se sont accordés sur le choix des deux arbitres.
Nous avons eu leur serment qu’ils se conformeraient strictement au Coran sans l’outrepasser ni en paroles ni en sentiments.
Ils s’en sont éloignés sciemment, en suivant le penchant de l’injustice et en adoptant les méthodes tortueuses.
D’avance nous avons déclaré nos réserves sur leurs décisions et leur capacité d’être justes, connaissant leur mauvaise foi et l’iniquité de leur jugement.
Après avoir constaté qu’ils ont quitté le chemin de la justice, présenté des arguments que personne ne comprend, enfreint les règles de la justice, nous ne nous considérons pas liés par aucun pacte mais détenteurs de notre propre décision.
Propos adressé à l’un de ses compagnons
Textuellement: «les sortants». Secte qui avait suivi l’Imam avant de lui avoir désobéi
«Tu prétends connaître le moment où l’on pourrait sortir sans risque et celui où l’on serait en danger?
Celui qui t’approuve sera en désaccord avec le Coran, se passe de l’aide de Allah pour atteindre ce qu’il désire et repousser ce qu’il craint.
Il faudrait, alors, pour celui-là, te rendre grâce aux lieux et place de Allah car d’après ta prétention ce indiqué serait toi qui lui aurais i le moment d’éviter les dangers».
Puis se tournant vers le public, il continua: «Gens! Méfiez-vous de l’étude des astres, sauf ce qui peut servir pour s’orienter sur terre ou sur mer.
Elle pousse vers la sorcellerie. L’astrologue est comme le sorcier, le sorcier est comme le magicien, le magicien est comme le mécréant et le mécréant va en enfer.
Marchez en proclamant le nom de Allah».
S’adressant dans leur cantonnement aux Khawarej…
Etiez-vous présents avec nous à Saffîne?
Ils répondirent: «Certains l’étaient, d’autres point».
Il leur dit: «Mettez-vous en deux groupes. Que ceux qui ont y assisté se mettent d’un côté et ceux qui n’y étaient pas de l’autre, afin que je dise à chacun ce que j’ai à lui dire.
Je vous demande le silence, écoutez bien ce que je vais vous dire, ouvrez-moi vos cœurs; si nous demandons à quelqu’un de témoigner qu’il vienne avec ce qu’il sait». Il parla longuement et dit aux autres, à ceux qui avaient assisté à Saffîne:
«N’avez-vous point dit lorsqu’ils brandirent le Coran par perfidie, malice, supercherie et trahison: «Ce sont nos frères et gens de notre foi. Ils ont cessé de nous combattre et reviennent au Livre de Allah. A notre avis il faudrait les accepter et desserrer l’étreinte?»
Je vous ai dit: «Cela, en apparence, est de la foi mais au fond c’est de l’hostilité le début est une bénédiction mais les suites un regret.
Restez sur vos positions, continuez à suivre votre chemin, accrochez-vous au Djihad, ne prêtez pas attention aux hurleurs. Si on répond à leurs désirs, ils trompent et si on les néglige, ils s’humilient. Les faits se sont ainsi passés et vous leur avez donné votre assentiment. Je jure par Allah, que puisque j’ai refusé l’arbitrage, rien ne m’y oblige et je n’en assume pas la responsabilité. Je jure également, par Allah que, si je l’avais accepté, je serais en droit de vous en tenir respectueux. Le Livre qui est mon guide depuis que je l’ai connu me donne fort raison.
Nous étions avec le Messager de Allah dans les combats alors que la mort enlevait les pères, les fils, les frères et les proches et chaque catastrophe et chaque difficulté ne faisaient que renforcer notre foi, nous faire persévérer dans le vrai, nous faire confier notre destin à Allah et augmenter notre résignation devant la douleur des blessures
Mais nous voici, maintenant, à combattre nos frères en Islam, pour ce qu’ils y ont introduit comme déviations, déformations, ambiguïtés et interprétations.
Si nous arrivons à un moyen par lequel Allah nous rassemblerait et nous rapprocherait par ce qui reste encore entre nous de commun, nous l’accepterons, et nous nous abstiendrons de tout autre moyen.
Aux Khawarej 1
Parole juste dont on se sert pour vous induire en erreur. Oui, Allah est l’unique autorité.
Mais ceux-ci disent en réalité: «I1 n’y a de gouvernant que Allah», alors qu’il est indispensable aux hommes d’avoir un gouvernent fût-il pieux ou pervers! Ainsi le croyant s’adonnera à de bonnes actions et le mécréant à ses caprices jusqu’au terme fixé par Allah.
Ce chef y amassera des richesses qui lui permettront de combattre l’ennemi, d’assurer la sécurité, d’arracher au puissant les droits du faible, afin de rassurer l’honnête homme et de n’avoir rien à redouter des impies.
Ne combattez pas les Khawarej après ma mort; car on ne saurait confondre ceux qui sont tombés dans l’erreur en aspirant à la vérité avec ceux qui ont réussi dans leurs desseins, en s’appuyant, dès le départ, sur l’injustice.
Aux Khawarej 2
Si vous continuez à prétendre que je me suis trompé et que je fais fausse route, pourquoi voulez-vous persister à imputer mes erreurs à toute la nation de Mohammad et à lui faire assumer mes fautes?
Vos sabres sont tirés à tort et à travers et vous ne faites point de distinction entre ceux qui ont commis des erreurs et ceux qui n’ont rien fait.
Vous savez pertinemment que le Prophète fit lapider l’adultère marié; puis a prié sur son corps et donné son héritage aux siens, comme il a fait exécuter le meurtrier et fait hériter normalement ses successeurs; il fit couper la main du voleur, fustiger l’adultère célibataire puis leur octroya leur juste part dans les revenus de l’Etat et les maria à des musulmanes.
Le Prophète les a ainsi punis pour leurs forfaits, leur a appliqué les jugements de Allah sans les priver, pour autant, de leurs droits sur l’Islam et sans les proscrire.
Vous méchantes gens! Instruments entre les mains de Satan qu’il utilise à son gré.
Deux catégories trouveront leur perte à cause de moi: un partisan passionné que sa passion aveugle conduit vers l’erreur et un haineux vindicatif que sa haine conduit également vers l’erreur.
Dans la situation présente et en ce qui me concerne, le meilleur des hommes est celui qui donne l’exemple en restant dans un juste milieu. Ecoutez-le; ralliez la majorité car la main de Allah est avec elle, prenez garde à la division.
Celui qui s’écarte de ses frères est pour Satan ce que l’agneau égaré est pour le chacal.
Quiconque sème la division abattez-le, fût il abrité par mon autorité.
Les deux arbitres ont été désignés pour vivifier ce à quoi le Coran a donné vie et détruire ce qu’il a condamné. Or vivifier c’est se rassembler autour du Coran et détruire c’est s’en séparer.
S’il nous oblige à les suivre nous nous joindrons à eux, et s’il leur impose de nous suivre qu’ils fassent de même.
Je n’ai point commis d’injustice envers vous, ni vous ai trahis dans mes fonctions, ni été peu clair!
Vos notables ont décidé de choisir deux arbitres qui nous ont promis de s’en tenir au Coran. Ils s’en sont détournés, ils ont abandonné la vérité qui leur crevait les yeux, suivi leurs passions qui étaient iniques.
Nous avons, d’avance, fait des réserves sur leur bonne foi et leur esprit de justice.
Lettre à Moawia
Moawia né à la Mecque, fondateur de la dynastie des Omeyades et du califat de Damas; il régna de 661 à 680. Après le meurtre de son cousin Othman (3e calife illégal des musulmans), il exploita habilement le désordre pour saper l’autorité d’ Imam Ali as, entraîner à la révolte la Syrie dont il était le gouverneur, et préparer son arrivée au pouvoir. Il intrigua pour la déchéance d’Imam Ali as en 658, se fit proclamer calife à Jérusalem en 660.
Ceux qui avaient prêté serment d’allégeance à Abu Bakr, Omar et Othman viennent d’en faire autant pour moi, dans les mêmes conditions, et pour les mêmes causes.
Aucune contestation n’était acceptable ni pour ceux qui y avaient pris part, ni pour ceux qui y étaient absents. Car la délibération y était aussi bien l’affaire des Muhajirine que celle des Ansar (habitants de Médine ayant accueilli et assisté l’arrivé du Prophète).
Si l’unanimité se réalise sur le choix d’un dirigeant, ce choix recevra la bénédiction de Allah.
S’il arrive que par contestation de ce choix ou par hérésie, quelqu’un rompt avec la volonté de la nation, on tâchera de le persuader pour le réconcilier avec cette même volonté.
Et, en cas de refus, il sera combattu, car s’étant écarté de la volonté des croyants, il devra endosser la responsabilité de son comportement.
O Moawia, de par ma vie, si tu jugeais raisonnablement et en l’absence de tout caprice, tu te rendrais compte que je suis, plus que quiconque, innocent de l’assassinat d’Othman, tu comprendrais que je n’étais impliqué dans cette affaire ni de près ni de loin; à moins que tu cherche à me calomnier.
Alors, laisse libre à tes calomnies comme bon te semble. Salut!
Encore à Mu’awia
Koreiche voulut assassiner notre Prophète et nous exterminer. Ils nous ont accablés de peines, nous en ont fait voir de toutes les couleurs, privés de tout ce qui agrémentait la vie, nous ont fait vivre dans la peur, nous ont obligés à nous réfugier en des montagnes difficilement accessibles et ont allumé contre nous tous feux de guerre.
Allah voulut que nous fussions les défenseurs de sa Loi pour la protéger contre ses détracteurs. Le croyant combattait dans l’espoir d’une récompense à l’au-delà et le mécréant par solidarité tribale. Ceux des Koreiche qui avaient embrassé l’Islam n’eurent pas à subir notre sort, protégés qu’ils étaient par un pacte tribal ou le soutien d’une famille. Ils étaient à l’abri de tueries.
Lorsque la bataille était en rage et que l’hésitation commençait à gagner les soldats, l’Envoyé de Allah plaçait les membres de sa famille au front pour protéger ainsi ses fidèles compagnons contre la terreur des sabres et des lances.
Ainsi furent tués Obeida Ibn Hareth lors de la guerre de Badr, Hazrat Hamza pendant la bataille de Ohod, Hazrat Jaafar dans celle de Mu’ta. Il m’est possible d’en citer d’autres ayant souhaité mourir lors de ces batailles comme eux mais la mort qui fauchait les autres les épargna.
Ironie du sort! On ose me comparer à celui qui n’a jamais mis les pieds dans le champ de la guerre sainte, et n’a pas eu comme moi, un passé de guerrier aussi chargé de gloire, à moins qu’on ne prétende ce que j’ignore et que peut être Allah même ignore.
Que Allah soit loué en toute circonstance.
Quant à ta demande de te livrer les meurtriers d’Othman, j’y ai bien réfléchi. Il n’est point question de les livrer ni à toi, ni à tout autre.
Si tu persistes dans ton indiscipline et dans ton oeuvre de division, bientôt tu les verras en face, te demandant des comptes. Ils ne te donneront pas la peine de venir à leur rencontre, ni par terre, ni mer, ni par plaine, ni dans les montagnes. Leur demande te mettra dans l’embarras et leur rencontre ne te sera point agréable. A bon entendeur, salut.
Egalement à Mu’awia
Que ferais-tu quand tu seras dépouillé des faveurs de ce monde qui te trompe par ses séductions et ses plaisirs?
Il t’a fait signe et tu lui as répondu, il t’a entraîné et tu t’es laissé faire, il t’a ordonné et tu as obéi.
Tu n’es pas loin d’être en présence de celui contre qui aucun bouclier ne saura te protéger.
Evite cette situation, fais provision de bonnes oeuvres pour le grand Jugement, prépare-toi pour le destin final, ne prête pas l’oreille aux flatteurs pervers.
Sinon je me verrai obligé de te dévoiler ce que tu sembles ignorer. Les faveurs de ce bas monde te trompent, le diable t’a possédé. En toi, il a atteint son objectif; il habite ton corps comme ton sang et ton souffle.
Explique-moi, donc, comment prétendre être le chef de cette nation quand on est sans passé glorieux, ni exploit honorable. Que Allah nous protège contre un passé de malfaiteurs!
Je te mets en garde contre la bassesse de tes désirs qui n’ont rien à voir avec ce que tu proclames ostensiblement.
Tu parles de guerre en y invitant les innocents, laisse-les donc paisiblement, épargne les deux troupes de tout affrontement,et sors a ma rencontre pour savoir lequel de nous deux a l’esprit aveugle!
Je suis le père de Hassan qui décapitai ton grand-père, ton frère et ton oncle maternel, le jour de Badr, je garde le même sabre et le même coeur pour faire face à mon ennemi.
Je n’ai point changé de religion ni de prophète, et je suis toujours le droit chemin que vous avez délibérément abandonné après l’avoir accepté par contrainte.
Tu prétends demander réparation du sang d’Othman, tu connais bien ceux qui en sont responsables, adresse-toi donc à eux dans ta besogne.
Je te vois mal dans cette guerre qui te fera gémir comme un chameau à la charge lourde; je vois déjà tes partisans, par peur de la pluie de nos armes, de leur sort si inéluctable et de la succession de leurs défaites, me demander le recours au livre de Allah, alors que dans leurs fors intérieurs, ils s’attachent à l’apostasie (idolâtrie) et te reconnaissent comme leur chef sans conformité avec le droit chemin.
Quant à ta demande du gouvernorat de Syrie, il n’est pas question de t’accorder aujourd’hui, ce que je t’ai refusé hier.
Lorsque tu dis que nous sommes tous descendant de Banu Abd Manaf, tu oublies que Umaya n’est pas Hachem as, que Harb n’est pas Abdel Muttalib as, que Abu Sofian n’est pas Abou Taleb as; encore moins les Muhagirine comme ceux qui furent captifs avant d’être recherchés, ni le descendant direct comme le descendant indirect, ni l’ayant-droit comme le faux prétendant ni le croyant comme le mécréant.
Méprisable descendance que celle qui suit son ascendance en enfer!
Quand Allah a fait adopter sa religion aux masses d’Arabes qui ont embrassé l’Islam par consentement ou par force, vous étiez de ceux qui se sont convertis par convoitise ou par peur.
Il est certain que ceux qui ont répondu les premiers à l’Islam se sont élevés plus hauts que les derniers, ainsi donc les premiers qui ont émigré de la Mecque ont plus de mérites que les autres.
Ne te donne pas au diable et ne lui confie point ton âme.
Salut
A Ziad son gouv. à Bassorah
Je jure sincèrement par Allah que, si jamais il m’ arrive un jour d’ apprendre que tu utilises une partie des biens publics à tes propres fins, petite ou grande soit-elle, je t’en ferai subir les conséquences si sévèrement que tu deviendras nécessiteux et misérable. Salut!
Sois économe et fuis la prodigalité, pense aux lendemains, ne dépense que selon la nécessité et réserve le surplus pour les cas de besoin.
Attends-tu de Allah une récompense comme celle des humbles alors que tu fais figure d’un homme orgueilleux? As-tu l’espoir de bénéficier de la récompense destinée aux bienfaiteurs, alors que tu te vantes dans l’abondance et en prives le faible comme la veuve?
L’homme sera récompensé de ce qu’il a avancé et trouvera ce qu’il a mis en épargne pour la vie future. Salut.