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Gérer le diabète pendant le mois de Ramadan

Médecine

« Allah cherche à vous faciliter l’accomplissement de la règle, il ne cherche pas à vous la rendre difficile » Chapitre II, verset 185

D’après les estimations, il y aurait quelque 1,5 milliard de musulmans dans le monde.
L’étude EPIDIAR (Epidemiology of Diabetes and Ramadan), réalisée sur la population générale, a révélé qu’environ 43 % des personnes atteintes de diabète de type 1, et 79 % des personnes atteintes de diabète de type 2, jeûnaient pendant le Ramadan.

Le Coran (le livre sacré de la religion musulmane) dispense spécifiquement les personnes atteintes d’une condition médicale du devoir de jeûne, en particulier si il peut avoir des conséquences néfastes.

Chapitre II verset 183:
« Si le jeûne peut altérer de manière significative la santé du jeûneur ou lorsque la personne est malade , l’Islam l’exempte du jeûne».
Chapitre II, verset 185:
« Allah cherche à vous faciliter l’accomplissement de la règle, il ne cherche pas à vous la rendre difficile »

Pourtant, de nombreuses personnes atteintes de diabète insistent pour jeûner pendant le mois de Ramadan. La décision du jeûne est généralement prise par trois personnes : la personne atteinte de diabète, son prestataire de soins et un conseiller religieux. Il est extrêmement important que les personnes atteintes de diabète et leurs prestataires de soins soient conscients des risques potentiels associés au jeûne.

Complications
Hypoglycémie
La réduction de l’apport en aliments est un facteur de risque bien connu de l’hypoglycémie. On estime que l’hypoglycémie est la cause de 4 % des décès chez les personnes atteintes de diabète de type 1. Il n’existe pas d’estimation fiable sur la contribution de l’hypoglycémie à la mortalité chez les personnes atteintes de diabète de type 2 mais elle serait une cause de décès occasionnelle.
 
Hyperglycémie
Les effets du jeûne observés chez les personnes atteintes de diabète sont variés : soit il aggrave la situation, soit il l’améliore, soit il n’entraîne aucune modification. L’étude EPIDIAR a révélé une multiplication par cinq de l’incidence de l’hyperglycémie grave (nécessitant une hospitalisation) pendant le Ramadan chez les personnes atteintes de diabète de type 2 – sans doute due à la réduction excessive de la prise d’hypoglycémiants.

Acidocétose diabétique
Les personnes atteintes de diabète qui jeûnent pendant le Ramadan sont exposées à un risque accru de développer une acidocétose diabétique, en particulier lorsque le taux de glycémie est élevé avant le début de la période de jeûne.

Déshydratation et thrombose
La déshydratation due à la limitation de la consommation de fluides peut avoir de graves conséquences dans les climats chauds et humides et chez les personnes qui effectuent des travaux physiques lourds. En outre, l’hyperglycémie peut entraîner la perte de fluides corporels en raison d’une miction excessive et contribuer à la déplétion d’électrolytes dans l’organisme.
Les personnes atteintes de diabète ont des taux d’anticoagulants endogènes plus faibles et sont plus exposées à la formation de caillots sanguins, qui peuvent entraîner une attaque cardiaque ou un accident cérébrovasculaire. L’augmentation de la viscosité sanguine provoquée par la déshydratation peut accentuer le risque de thrombose.

Observations générales
Plusieurs points importants méritent une attention particulière.

Contrôles fréquents

Il est essentiel que les personnes atteintes de diabète aient les moyens de contrôler leur glycémie à plusieurs reprises tout au long de la journée. Ce point est particulièrement critique pour les personnes insulinodépendantes.

Nutrition
Les personnes atteintes de diabète doivent maintenir une alimentation saine et équilibrée pendant le Ramadan. La coutume qui demande de manger de grandes quantités d’aliments riches en graisses et en hydrates de carbone, en particulier lors du repas du soir, doit être évitée. Il est recommandé d’augmenter l’apport en boissons non caloriques en dehors des heures de jeûne. Le repas pris avant l'aube doit être pris le plus tard possible avant le début du jeûne quotidien.

Activité physique
Des niveaux d’activité physique normaux doivent être maintenus. Toutefois, une activité physique excessive peut accentuer le risque d’hypoglycémie et doit être évitée. Si les prières du Tarawih (ensemble de prières après le repas du soir) sont récitées, elles doivent être considérées comme faisant partie intégrante du programme d’activité physique quotidien.

Interruption du jeûne
Il est essentiel que les personnes atteintes de diabète comprennent qu’elles doivent immédiatement interrompre le jeûne dans les cas suivants :
si la glycémie chute fortement, inférieure ou égale à 3,3 mmol/l (60 mg/dl)
si la glycémie atteint 3,9 mmol/l (70 mg/dl) pendant les premières heures suivant le début du jeûne, en particulier lors de la prise d’insuline, de sulfonylurées ou de méglitinides lors du repas du matin
si la glycémie augmente de façon excessive, au-delà de 16,5 mmol/l (300 mg/dl).

Evaluation et conseil
Toutes les personnes atteintes de diabète qui souhaitent participer au jeûne du mois de Ramadan doivent se préparer de façon adéquate afin de suivre le jeûne en toute sécurité. Cela implique une évaluation médicale et des conseils éducatifs.

Evaluation médicale
Des tests sanguins appropriés doivent être prescrits et évalués.

Conseils éducatifs

Il est essentiel que les personnes atteintes de diabète et leur famille reçoivent une formation adéquate et appropriée aux soins autonomes, qui aborde les signes et symptômes de l’hyperglycémie et de l’hypoglycémie, le contrôle glycémique, la planification des repas, l’activité physique, les médicaments et la gestion des complications graves.

Le diabète de type 1
De façon générale, les personnes atteintes de diabète de type 1 sont très exposées au risque de développer des complications graves et doivent être vivement encouragées à ne pas participer au jeûne du Ramadan.
Habituellement, si elles insistent à jeûner, elles auront besoin de deux injections quoti-diennes d’insuline d’action semi-retard NPH, administrées avant les repas qui précèdent l’aube et qui suivent la tombée du jour, combinées à une insuline d’action rapide pour couvrir l’apport en aliments lors des repas.
L’utilisation d’une insuline d’action prolongée ultralente constitue une option, à raison de deux injections quotidiennes à 12 heures d’intervalle pour imiter l’insuline basale, combinée à une insuline d’action rapide avant les deux repas. L’insuline ultralente ne peut pas vraiment être considérée comme une insuline basale en raison de son pic d’action large qui oscille entre 8 et 14 heures. Par conséquent, une hypoglycémie prolongée peut se produire, en particulier parce que la durée d’action de l’insuline ultralente est très variable – entre 18 et 30 heures.
Une autre option serait d’utiliser une injection quotidienne de l’analogue de l’insuline d’action prolongée glargine ou deux injections quotidiennes de l’analogue de l’insuline detemir, combinées à des analogues de l’insuline d’action rapide avant les repas.

Le diabète de type 2
Style de vie et nutrition
Chez les personnes atteintes de diabète de type 2 qui gèrent leur diabète par le biais de l’alimentation et de l’activité physique, les risques associés au jeûne sont assez faibles. Toutefois, si elles mangent trop, le risque d’hyperglycémie après les repas qui précèdent l’aube et qui suivent la tombée du jour est réel. Répartir l’apport énergétique sur deux ou trois repas plus légers pendant la période où le jeûne est suspendu peut contribuer à prévenir l’hyperglycémie après les repas. Le programme d’activité physique quotidien habituel doit être adapté en termes d’intensité et de durée afin d’éviter les crises d’hypoglycémie.

Médicaments oraux
En général, les médicaments dont l’action consiste à augmenter la sensibilité à l’insuline sont associés à un risque nettement plus faible d’hypoglycémie que les composés qui agissent en augmentant la sécrétion d’insuline. Les personnes sous metformine peuvent jeûner sans risque car la possibilité d’hypoglycémie est minime. Toutefois, la répartition des doses doit être modifiée : les deux tiers de la dose quotidienne totale doivent être pris immédiatement avant le repas du soir et le dernier tiers avant le repas du matin.
Les personnes qui prennent des insulinosensibilisants (rosiglitazone et pioglitazone) ont un risque d’hypoglycémie faible. Généralement la dose ne doit pas être modifiée.

Insuline
Les problèmes auxquels sont confrontées les personnes atteintes de diabète de type 2 sous insuline sont similaires aux problèmes liés au diabète de type 1, bien que l’incidence de l’hypoglycémie soit plus faible. De nouveau, l’objectif doit être de maintenir les taux d’insuline basale adéquats.

Grossesse et jeûne
La grossesse implique un état de plus grande insensibilité à l’insuline et de sécrétion d’insuline. Pendant le jeûne, les taux de glycémie sont plus faibles, mais les taux de glycémie après les repas et les taux d’insuline restent considérablement plus élevés chez les femmes enceintes en bonne santé que chez les femmes qui ne sont pas enceintes. Les femmes doivent être conscientes que des taux élevés de glycémie pendant la grossesse sont associés à un risque accru de malformations congénitales graves.
Bien que ce sujet fasse l’objet d’une certaine controverse, le jeûne pendant la grossesse serait associé à un risque élevé de décès et d’infirmité tant pour le foetus que pour la mère.

Conclusions
Il est crucial que la décision de jeûner soit prise après une discussion approfondie avec son médecin sur les risques qu’elle implique. Les personnes atteintes de diabète doivent suivre un programme de gestion hautement personnalisé et une surveillance étroite est essentielle pour réduire le risque de développement de complications.

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